Ça ne fait pas deux heures que tu es rentrée à la maison avec les enfants, que ceux-ci se chicanent déjà (pu capable).

-“Aille-eeeeh! C’est à mon tour” 

– “Non, c’est avec moi que maman veut jouer, pas avec toi… mamaaaaaan!!”

Soupir.

Tu viens d’accorder du temps au plus grand qui voulait te montrer ses progrès en lecture. Évidemment, ça ne prend pas 2 minutes que le deuxième vient te voir pour jouer au lego. Tu regardes l’heure. My God, c’est tout le temps la course le soir. Tu aimerais ça évidemment, avoir du temps, mais ta réponse est toute autre. 

«Ça suffit là. Allez tout le monde sort de la cuisine,  je dois préparer le souper…».

Le petit rétorque déjà, tout en reniflant : «tu m’aimes moins que mon frère. Tu as joué avec lui et pas avec moi …». Oh boy… Encore une belle soirée en perspective… Est-ce que c’est juste moi qui a l’impression de vivre le jour de la marmotte tous les soirs? La chicane entre mes enfants… Pu capable! 

Si tu rêvais de la famille idéale, parfaite, sereine et unie 24h sur 24, «je pète ta bulle» tout de suite, ça n’existe pas. Et oui, nous sommes humains et le seul fait d’être frère et sœur ne rend pas les relations plus faciles, bien au contraire. Qu’il s’agisse de personnalités non-compatibles (on ne peut pas s’entendre avec tout le monde) ou de jalousie, les rivalités sont quasiment inévitables dans toutes les familles de plus d’un enfant. La chicane entre les enfants fait malheureusement partie de la vie de famille.

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Il faut arrêter de se voiler la face en lâchant à la va-vite un «mais non, je vous aime de la même façon tous les deux». L’égalité dans la fratrie, ça n’existe pas. Il n’y a pas un enfant qui représente la même chose pour ses parents. Chaque enfant est différent, unique, singulier. Et cette singularité est particulièrement importante. Donc, il faut faire attention à ne pas confondre différences et préférences! 

Le lien et la connexion que tu as avec chacun de tes enfants est unique. Par exemple, un de tes enfants pourrait être super patient et l’autre très impulsif. Évidemment qu’avec ta propre personnalité et ton propre tempérament, certains traits de caractère de tes enfants concordent mieux que d’autres avec la tienne, c’est normal! Est-ce que tu en aimes un moins qu’un autre? Non, tu les aimes juste différemment. Pour toi, c’est peut-être plus facile avec un qu’avec l’autre et pour ton partenaire, c’est peut-être l’inverse! C’est important que chaque enfant soit apprécié pour ce qu’il est, plutôt que d’entrer dans la comparaison et la compétition inconsciente. C’est important de refléter à tes enfants qu’ils ont chacun leurs forces et leurs faiblesses et que tu les aimes comme ils sont.

Mais plus concrètement que ça, naître le frère ou la sœur de quelqu’un, c’est apprendre à diviser ce qui nous est donné par les parents pour le partager avec l’autre. Quand on parle d’amour, c’est pas rien! As-tu déjà pensé à ce que ça te ferait, si du jour au lendemain ton conjoint ou ta conjointe t’annonçait que tu aurais à le/la partager avec un inconnu? Sans avoir le droit de t’objecter, sans savoir si c’est un bon “fit” pour toi, sans pouvoir prendre tes cliques et tes claques puis de sacrer ton camp si la situation devenait inconfortable… Ouf! Non-merci!

Pour tes enfants, c’est pas si différent. C’est un gros apprentissage. C’est surtout d’apprendre à en avoir moins parce que les besoins de l’autre sont tout aussi importants que ses propres besoins. Et souvent, quand un enfant a peur d’en avoir moins, il cherche à en avoir plus …

Toutefois, si les rivalités sont inévitables, comme dans la vie, on peut apprendre à bien s’entendre ou, au mieux, à bien communiquer. Voici d’ailleurs quelques pistes d’interventions.

De la lumière au bout du tunnel,!

astuces pour mettre fin aux chicanes d'enfants famille

Voici quelques pistes pour accompagner tes enfants : 

Apprendre à s’exprimer avec des mots.

On ne le répétera jamais assez : l’importance des mots. Apprendre à son enfant à s’exprimer et à nommer ses émotions, accueillir les émotions de son enfant (il n’y a pas de mauvaises émotions), c’est un bon départ. 

Exemple : Je comprends que tu es déçu et que tu trouves cela injuste. Tu as raison de te sentir comme ça. Maintenant, je dois faire le souper, mais qu’en penses-tu si on mettait la table ensemble?

 

Respecter l’individualité de chacun au sein de la fratrie.

Qui n’a jamais entendu les fameuses étiquettes que nos propres parents nous mettaient. Dans la famille, tu répondais peut-être à l’étiquette de caractère de cochon, lent, calme … tout ce qui incite à la rivalité. Il est temps de valoriser chacun de vos enfants dans leur individualité. 

 

Instaurer des moments en tête-à-tête.

Passe du temps avec tes enfant, instaure un moment exclusif, un moment privilégié. Cela permettra à ton enfant de renforcer son sentiment d’exister en tant qu’individu, en tant qu’être important. Pas besoin de te lancer dans de grosses sorties, juste qu’il sache que tu es là pour lui.

 

Tolérance zéro pour la violence.

Mets une limite claire : aucune violence ne sera tolérée, qu’elle soit physique ou verbale. J’ai souvent utilisé l’expression des «mots-cailloux», d’Isabelle Filliozat, qui permet aux enfants de comprendre la portée de certains mots et la douleur que ceux-ci peuvent causer. 

Si ton enfant dit, que ce soit à son frère, sa sœur ou même à toi quelque chose du genre  “je vais te mettre dans la poubelle, comme ça tu seras plus là pour briser mon château”, c’est choquant, n’est-ce pas

Mais qu’est-ce que l’enfant veut dire? Quel est son message? Il veut probablement exprimer qu’il voudrait jouer seul et qu’il est frustré de se faire détruire sa construction dans laquelle il a investi beaucoup d’efforts (je le comprend). Toi comme parent, tu ne peux pas laisser ton enfant utiliser ce genre de paroles, mais comme tu comprends son message, tu peux l’aider à reformuler ce qu’il veut dire : Je vois un Samuel très fâché. Je comprends aussi que tu aimerais mieux jouer tranquille dans ta bulle. Est-ce que c’est ça que tu veux dire? Mais je ne peux pas te laisser utiliser des mots qui font de la peine. Quand quelque chose te dérange, je veux que tu utilises ta voix pour dire qu’est-ce qui te dérange. 

 

Être un parent-médiateur plutôt qu’un arbitre. 

Inutile d’intervenir à chaque fois. Toutefois, quand le besoin se fait sentir, ne te positionne pas en arbitre mais plutôt en médiateur. Fais participer tes enfants à la recherche de solutions pour régler le conflit. Ils sont souvent très créatifs et en ressortiront grandis. Si tes enfants sont encore petits pour être en mesure de trouver des solutions par eux-mêmes (en bas de 3-4 ans), je te suggère de leur offrir des choix de solutions ou de gestes réparateurs. D’ailleurs, lorsque tu vois que la présence d’un enfant semble déranger l’autre, pourquoi ne pas leur proposer à chacun un endroit pour jouer “dans leur bulle”, avant que ça pète? Parfois la prévention a bien meilleur goût! 😉

 

Sois un modèle pour tes enfants.

C’est le moment de voir comment toi, tu réagis en tant qu’adulte, devant les conflits. Comment tu les règles? As-tu besoin de quitter la pièce? As-tu besoin de sacrer, de crier, de cogner? N’oublie pas que les enfants sont des éponges. Alors, pourquoi ne pas essayer d’offrir le meilleur modèle qui soit?

Même si c’est parfois décourageant, la fratrie, c’est avant tout un lien à construire. Tout est à inventer, à créer : les moments de complicité, les occasions de collaborer, les règles, l’apprentissage du respect mutuel … et même s’ils sont parfois un peu comme chien et chat, chaque petit pas compte. 

Au final, la fratrie c’est quand même une belle complicité qui se forge au fil des années et qui restera un lien incroyablement sécurisant! 

Quelques références si tu souhaites aller plus loin : 

Avec tes enfants :

  • Frères et sœurs, les cahiers Filliozat
  • Mes p’tits pourquoi, frères et sœurs, Milan 
  • Petit frère, petite soeur : mode d’emploi, Michaël Escoffier

Anne-Laure Lavigne